Bolivie – De Viña del Río à Naranjal en 25 km par Kevin

TOTAL : 20 580 km

Dernier jour à Madidi

Ce dernier jour dans le parc Madidi s’est terminé en toute tranquillité avec le soleil, à l’image de Melvin et Carmelo. Nous avons commencé la journée par une balade dans la forêt, à deux seulement. Les sensations étaient plus fortes. Melvin nous a ensuite emmenés dans un autre coin de l’Amazonie en nous expliquant quelques techniques pour se retrouver dans la forêt, quels sont les quelques arbres médicinaux, le tout en observant les singes qui nous survolaient.

Le parc Madidi restera gravé dans notre mémoire, une première approche de cette forêt sauvage, et il restera gravé sur notre peau. Pas moins de 60 piqûres de moustiques en une soirée pour Maïwenn, bravo ! Retour à Rurrenabaque pour continuer notre avancée vers le nord de la Bolivie.

Rio Beni – Cachichira

Le lendemain, 9 h, nous avons retrouvé Luiz, sans Marco, pour reprendre la route vers le nord. Le chargement de la pirogue de 15 m avec les trois congélateurs s’est bien passé. Les vélos à l’avant et les sacoches dans un congélateur.

Luiz devait partir samedi pour aller à la pêche pendant 20 jours, il a gentiment accepté de nous attendre 4 jours en nous embarquant sur plusieurs centaines de kilomètres. Luiz part habituellement seul à la pêche, il charge ses congélateurs, les alimente avec des générateurs pour les garder frais et part ensuite à La Paz en voiture pour les vendre. Une vraie expédition mensuelle qui lui permet de nourrir ses trois enfants.

11 h 30, nous avons pris le large et avons salué Rurrenabaque en disant au revoir à toutes ces personnes qui nous ont aidés dans notre aventure, qui s’est finalement concrétisée. Luiz a pris le temps de discuter avec nous tout en gardant un œil bienveillant sur le Río Beni, qui est dangereux avec son peu de profondeur et les nombreuses épaves de bois qui flottaient. Un río étonnant, qui change régulièrement de comportement. Il était parfois mouvementé et à d’autres instants calme, comme un lac. Il nous a aussi enseigné les manipulations pour naviguer sur cette rivière. Quelques heures de mise en pratique très intéressantes.

Pour cette première nuit, nous avons dormi dans une communauté, Tachichichari, à quelques mètres du río, sans entrer dans la forêt amazonienne. Une communauté de 8 personnes seulement. Ils nous ont trouvé un emplacement en face du río et nous avons partagé le repas, à base de riz, tous ensemble. Nous étions entièrement coupés du monde ! Cette coupure n’a pas empêché les centaines de moustiques de venir nous piquer. Le plus dur dans le voyage restera les moustiques.

Rio Beni – Monte Rey

Les moustiques nous ont salués pour cette deuxième journée de navigation. Nous avons déjeuné en groupe, du riz et de la viande, et avons pu emporter des fèves de cacao, des cocos, papayes et un chocolat à 100 % fraîchement pressé. Un vrai régal avec de l’eau et du sucre.

Après avoir écopé la pirogue, nous avons quitté cette communauté et avons rallumé les deux moteurs PEK PEK, le bateau flottait toujours, à quelques centimètres de l’eau. Nous avons pris tour à tour la barre et la journée était sportive. De nombreux morceaux de bois à éviter, une faible profondeur de rivière qui nous a même arrêtés en plein milieu et le bruit des moteurs fatiguent.

Nous avons pu déjeuner du piranha avec du riz, sur le côté du río avec un groupe qui est installé depuis un mois. Ils exploitent du bois en direction de La Paz. Ils nous ont offert des fruits (motacú) que les singes mangent également. Un sacré dépaysement que de rencontrer ces personnes sur la route. Des visages marqués par la fatigue et la difficulté des conditions de vie dans l’Amazonie, mais des rires s’entendaient dans les conversations. Nous étions en total décalage avec eux, mais nous avons pris le temps pour créer le dialogue et les sourires sont apparus.

Luiz avait rempli ses frigos de pain, de piles, de lampes, d’alcool… Un véritable marché ambulant. Lorsque nous nous sommes arrêtés, ils lui ont acheté de quoi vivre. Luiz se fait une petite marge par rapport à la ville, de quoi amortir les frais de déplacement pour la pêche.

Nous nous sommes arrêtés dans une autre communauté, Monte Rey, un peu plus grande que celle de la nuit précédente. Un habitant nous a prêté un toit dans la cuisine. Ce village est alimenté par un gros générateur à gasoil, qui est en marche de 18 h à 21 h. Ça rappelle à Kevin le sud du Maroc et la Mauritanie.

Sur notre carte, nous avons aperçu des pistes d’atterrissage pour avions. Luiz nous a expliqué qu’aujourd’hui c’était utilisé par les narcotrafiquants pour exporter la cocaïne. On a sûrement bien fait de prendre la pirogue plutôt que la route…

Les yeux se sont vite fermés pour se reposer pour demain.

Rio Beni – Las Penitas Rio Negro

Nous devions partir à 6 h et déjeuner sur la rivière, mais les éclairs de la nuit se sont rapprochés. Une grosse pluie nous a forcés à rester, mais l’avantage c’est que ça a prolongé notre nuit. La personne qui nous a accueillis nous a préparé un plat typique de Beni : riz et morceaux de viande à l’huile pimentée.

Nous avons retrouvé notre pirogue un peu avant 11 h, elle était complètement bloquée dans le sable et il nous a fallu 30 minutes pour la sortir de là. Deux personnes de la communauté nous ont aidés et ont même apporté une autre pirogue pour désensabler les fonds.

Une petite heure de navigation sous la pluie et la journée a repris son cours habituel. Pas le temps de s’ennuyer à bord !

Notre retard de ce matin nous a fait atterrir dans une communauté surprenante : Río Negro. Il fallait emprunter une étroite rivière pour y accéder, seuls les connaisseurs comme Luiz pouvaient nous faire découvrir ce village, ce retour dans le passé. À peine arrivés, nous avions vite compris que nous étions des étrangers : le regard des habitants et surtout des jeunes était figé sur nous. 40 maisons, 60 enfants, 1 école, de nombreux animaux qui circulaient dans le village, c’était un énorme décalage. Cette communauté peut être accessible par 4×4, si la pluie n’a pas bloqué l’unique chemin.

Nous étions invités chez une bonne connaissance de Luiz. Elle nous a préparé du riz avec de la viande… Encore du riz !

Comme nous sommes arrivés tôt, nous en avons profité pour faire un petit tour des maisons en bois en saluant les habitants. Des enfants jouaient au foot en face de l’école et d’autres se rassemblaient en dessous d’un arbre, unique lieu où le réseau était disponible, avec un peu de chance car il était très faible.  

Après un bon riz avec de la viande, nous étions invités à la messe évangélique, nous avons donc accepté d’y assister.

Luiz nous a confié que cette communauté ne manquait de rien et par conséquent, elle n’était pas pauvre. La notion de pauvreté est bien différente ici ! Tant que la population mange, elle n’est pas pauvre. Pourtant, les infrastructures, le moyen de transport, l’accès aux soins et à l’eau propre sont précaires.

Le ciel s’est découvert, annonçant une belle nuit.

Rio Beni – Pena Guarayo

Le réveil s’est fait sous une épaisse brume, le village s’est réveillé doucement vers 7 h avec une petite musique et le bruit des cochons qui commençaient leur belle journée de nutrition.

Au petit déjeuner : riz ! On commençait à vouloir une belle salade fraîche mais bon on s’est adaptés aux habitudes locales.

Nous avons repris la route vers le Río Beni, bien plus large que le Río Negro et, sur la route, un couple nous a fait signe. Le langage des signes est très précis ici, ils arrivent à ne communiquer qu’avec la gestuelle. Luiz les a reconnus et s’est dirigé vers eux. Ce couple vit avec ses dix enfants dans la jungle, complètement seul et en totale autonomie. Quand Luiz est de passage, il offre de quoi manger (riz, pain…) et bien évidemment des feuilles de coca. Pour le coup, eux sont vraiment coupés du monde. Ils étaient étonnés de voir Maïwenn manœuvrer la pirogue. Ils ont un peu discuté avant que nous reprenions la route vers Peña Guarayo.

Nos derniers instants avec le bateau de pêcheur ; nous sommes arrivés à Peña Guarayo et avons été accueillis par un autre ami de Luiz, qui nous a offert le déjeuner. Cet ami a 11 enfants et nous a raconté qu’il était polygame, et donc qu’il avait plusieurs enfants dans le secteur. La simplicité avec laquelle il nous a dit ça nous a un peu surpris mais en Bolivie c’est accepté.

Nous avons eu le temps de nous installer sous le regard intéressé des enfants, à qui nous avons fait une présentation du projet sous un nuage de moustiques.

Le ciel dégagé nous a fait découvrir un beau croissant de lune et ses étoiles.

Rio Beni – Plage

L’heure a sonné, nous avons changé de bateau pour un plus petit et plus léger. Nous avons dit au revoir à cette pirogue, qui nous a accompagnés sur le Río Beni pendant 4 jours sous le regard intrigué des caïmans, qui n’avaient pas vu beaucoup de vélos.

Nous nous sommes ensuite arrêtés dans une autre communauté pour que Luiz soit accompagné sur le reste du chemin. Il connaît moins bien cette partie. Nous avons à nouveau changé de bateau pour un encore plus petit et moins confortable mais pour le coup encore plus folklorique.

Petit passage à Cavinas, incroyable mais vrai, l’armée navale est là pour enregistrer les passages. On se demandait comment ils feraient si les passeurs ne s’arrêtaient pas. Cavinas était pour nous une étape, puisque c’est la première communauté qui rattrape une des routes principales. On avait évoqué l’idée de s’arrêter là, mais les rencontres nous ont menés encore plus loin. Une communauté reliée par voie terrestre.

Nous avons aussi croisé sur la rivière des perroquets rouges et d’autres bleus.

Les heures défilaient à la vitesse de la pirogue, pas trop rapide et pas trop lente. Le soleil nous avait préparé un magnifique spectacle avec ces belles couleurs orangées, ce ciel bleu et ces arbres verts !

La nuit est vite arrivée, trop vite, nous n’avions pas eu le temps d’arriver à destination. Une belle plage nous attendait avec une quantité de moustiques impressionnante. On a campé un peu plus haut que le río, car l’eau peut monter très vite en une nuit. C’est d’ailleurs au réveil que nous nous sommes rendu compte que l’eau avait bien grimpé, suffisamment pour atteindre la bouteille de gaz et emporter l’ensemble de nos ustensiles de cuisine. Une nouvelle mission est apparue : retrouver de quoi faire chauffer de l’eau en Amazonie.

Rio Beni – Vina Del Rio

Quand Luiz nous donnait la durée du voyage, il visait toujours un peu plus bas que la réalité. Probablement une manière pour lui de se motiver à naviguer durant de longues heures. Sur la fin, Kevin estimait la durée du voyage en fonction de la vitesse de la pirogue et du tracé sur une carte. Il savait que pour cette dernière journée, il nous fallait trois heures. Pour Luiz, il devait nous rester qu’une heure de trajet. L’expérience du capitaine ne peut être contredite, donc nous ne disions rien. Au final, c’était bien trois heures.

L’aventure en pirogue a pris fin à Viña del Río :

  • 6 jours de voyage
  • 596 km parcourus sur le Río Beni et le Río Negro
  • 38 h 45 heures sur la pirogue
  • 6 communautés rencontrées
  • 3 pirogues différentes empruntées
  • 2 cyclistes prêts à repartir

On a dit au revoir à cet homme extraordinaire, Luiz notre capitaine ! Un grand merci à ce Bolivien exemplaire que nous avons rencontré à Rurrenabaque grâce à Carioca.

À peine sortis de la pirogue que l’aventure a vite repris. Un policier s’est approché de nous pour nous demander nos papiers. Il a pris le temps de bien vérifier et a constaté que nous avions dépassé les 90 jours du visa. Chose que nous savions et nous comptions payer une amende à la frontière de Cobija. Ce pays est trop beau pour le quitter. Le policier n’a rien voulu entendre et nous a donné rendez-vous au poste, dès que nous avions terminé de ranger nos affaires. Les Boliviens qui ont suivi l’interpellation nous ont confié qu’il allait nous demander de l’argent. Quelques minutes plus tard, nous avons deux hommes qui en effet voulaient nous faire payer une amende supplémentaire et nous amener à la frontière. Nous avons contesté, et au bout de 40 minutes d’entrevue, le « chef » nous a redonné nos papiers avec le sourire. Ne rien lâcher ! Il est courant dans certains pays que certaines personnes essayent de nous amadouer, il faut prendre ça avec calme et avoir des arguments pour ne pas se laisser avoir.

Nous avons ensuite repris la route vers une petite communauté : Naranja, où nous avons pu dormir dans une maison abandonnée.

Descriptif de la semaine :

#PIROGUE – 1 – Rurrenabaque – Cachichira – 6 h 42 – 95,9 km
#PIROGUE – 2 – Cachichira – Montey Rey – 10 h 08 – 157,6 km
#PIROGUE – 3 – Montey Rey – Las Peñitas Río Negro – 4 h 38 – 75,87 km
#PIROGUE – 4 – Las Peñitas Río Negro – Peña Guarayo – 5 h 23 – 83,7 km
#PIROGUE – 5 – Peña Guarayo – Plage – 8 h 31 – 134,2 km
#PIROGUE – 6 – Plage – Viña del Río – 2 h 48 – 48,5 km
#311 – Viña del Río – Naranjal – 25 km – 151 m de dénivelé – Hébergés

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